30e anniversaire du printemps berbère :
Identité, vos papiers !
Dimanche 20 avril 1980. « A 4hl5 du matin, alors que
tout le monde s’était endormi à l’issue d’une longue réunion jusqu’à 3h,
plusieurs compagnies d’agents des forces de l’ordre (gendarmes mobiles,
CRS) donnent l’assaut. Ils sont casqués et armés de fusils, baïonnette
au canon, matraques, grenades lacrymogènes... Ils ne tirent pas de
balles mais, en revanche, ils pénètrent violemment dans les chambres de
la cité universitaire et matraquent tout le monde. Coups de crosse et de
baïonnette pleuvent sur les étudiants. » Le témoignage de Rachid
Chaker, enseignant en économie à l’université de Tizi Ouzou à l’époque,
témoigne de la férocité de la répression qui s’est abattue sur les
acteurs de la première révolte populaire de l’Algérie indépendante.
Raison directe de la colère
officielle : l’invitation faite à Mouloud Mammeri de tenir une
conférence sur la poésie kabyle. Mais derrière se cachait une raison
d’Etat : le refus de toute voix indépendante de l’orthodoxie officielle.
Qu’est-ce qui a changé depuis, 30 ans plus tard ? Presque rien. Le
régime sort toujours ses vieilles rengaines aux allures de marches
militaires : la matraque, la « main de l’étranger », l’« union sacrée »,
les « constantes nationales », « espèces de harkis ! », etc. Selon le
dogme dominant, on est Algérien, musulman et Arabe ou on ne l’est pas.
Car personne ne croit plus aux discours des officiels autour de
l’identité amazigh tant que cette dimension de l’Algérien (du Maghrébin)
n’est soutenue par aucun dispositif légal ou académique.
Et le déni de la multiculturalité des Algériens frappe au quotidien.
Quand un ancien chef de gouvernement proclame le malékisme comme seul et
unique rite pour les Algérien. Quand on traque les chrétiens algériens
comme des criminels. Quand on folklorise les cultures des Touareg. Quand
on déclare apostasie toute liberté de pensée ou de croyance. Quand un
climat malsain imposé par le discours bigot favorise les insultes
impunies contre les juifs, les athées, les femmes, les homosexuels, les
francophones, les binationaux... Est-ce de l’extrapolation ? Non, car
fermer les yeux sur un seul déni ouvre la voie à toutes les dérives, à
tous les fascismes. Et nous sommes sur la bonne voie : on ne peut parler
d’identité dans un climat liberticide où même les salons du livre et
les galas dans les cités U sont surveillés comme des maquis hostiles.
L’Algérien, bafoué quotidiennement dans ses droits, peut-il être à
l’aise avec son identité ? L’Algérie est un pays fragile, construit sur
des mythes exclusifs et des arsenaux répressifs. L’Algérie a raté
l’occasion de devenir un pays fort, riche de sa multiculturalité et de
la confiance des Algériens en leurs gouvernants.
Par Adlène Meddi el watan
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